Vexé mais jamais honteux

C’est beau de le voir faire face, Pancho Fillon. Impressionnant. Un dur de dur, un résistant, acculé par la horde des hyènes dactylographes qu’il compisse abondamment d’urine bénite. N’importe quel pékin serait allé se cacher dans un trou à rats après les révélations qui se sont accumulées, consacrant sa tartuferie inouïe, sa mesquinerie de rapiat gominé, son hypocrisie éhontée de bigot cupide, oncle Picsou déguisé en gendre idéal et soudain démasqué, n’importe qui serait mort de honte, mais pas lui. Ah, pas du tout.

Ces gens, comme dit un ami à moi, tu peux les vexer mais certainement pas leur faire honte. Pas une once de morale bien qu’ils en aient plein la bouche, mais de l’ego à ne plus savoir qu’en foutre. Ça va à la messe, ça gobe son hostie consacrée avant le repas dominical, foie gras et chapons fourrés qu’ils se sont payés en faisant les poches du populo. Et tout en s’empiffrant, ça disserte en famille sur l’intolérable parasitisme des chômeurs et des assistés, ça donne urbi et orbi des leçons de bonnes mœurs, ça ne doute de rien et sous le discours onctueux, on sent la règle sans pitié de l’égoïsme clanique. Ça n’a jamais mis les mains à la pâte ni dans le cambouis mais ça exhorte tout un chacun à se crever l’échine.

Montaigne connaissait bien Fillon et ses semblables : « ils envoient leur conscience au bordel mais tiennent leur contenance en règle. »
On cherche désespérément parmi les candidats celui qui pourrait racheter les autres. Les voilà sur scène, bien décidés à nous en mettre plein la vue. Après les proclamations bravaches des primaires, c’est le grand bal des reculettes. Chacun met de l’eau dans son vin. De l’eau dans le vin ! Pauvre France.

Article de Jean-Marie Laclavetine dans Siné mensuel de mars 2017.

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