répression : mater la meute

Aux États-Unis, au Canada et en Europe, la répression des manifs s’anticipe, s’affine et se militarise à grands pas de l’oie. La Canadienne Lesley J. Wood propose un tour d’horizon de l’inventivité des forces de l’ordre.
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Prof de socio à Toronto mais aussi militante altermondialiste, la Canadienne Lesley J. Wood analyse dans Mater la meute les polices locales canadiennes et étasuniennes qui, peu soumises à la tutelle du politique, développent des options tactiques et technologiques plus ou moins autonomes. Usage du gaz au poivre (qui remplace le gaz lacrymogène en Amérique du Nord), du Taser, arrestations préventives, barrières hautes fermant les rues et clôturant des périmètres interdits, ou déterminant à l’inverse des enclos limitant toute allée et venue hors du périmètre.
Canons à son, grenades incapacitantes, balles en caoutchouc dur, et infiltrations vieilles comme la flicaille complètent l’attirail. Lequel est variable d’une grande ville à l’autre, sans doctrine nationale unifiée. Et on a vu le résultat, par exemple, lors des émeutes de Ferguson en 2014.
La montée en puissance de leur pouvoir est liée à une culture partagée avec le secteur privé de l’économie de la répression. À l’affût des innovations techniques, les cops côtoient dans les conférences et salons professionnels les fournisseurs de matériel anti-émeute, les industriels et experts du sécuritaire. Armement, équipement, déploiements et mouvements de police pour encadrer les manifs adoptent de plus en plus le registre de la guerre.
Ce n’est toutefois pas une nouveauté, souligne Mathieu Rigouste dans la postface de cet ouvrage. Écrite avant l’état d’urgence, elle rappelle la filiation de l’appareil répressif tricolore avec l’héritage colonial, la Bataille d’Alger en 1957 et la répression des militants algériens en France.
Reste que deux logiques se côtoient. D’une part, les industriels du sécuritaire ont tout intérêt au maintien de cette colère sociale qui alimente leur marché. D’autre part, les États parient sur la peur comme instrument de contrôle et de domination. Et, malheureusement pour les opposants aux puissants, les deux ne sont pas incompatibles !

Extrait d’un article de Nicolas de la Casinière dans le journal CQFD de janvier 2016.

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