Économie virtuelle

[…] Or c’est oublier que cette économie « virtuelle » repose sur une chaîne industrielle bien réelle, avide de métaux rares dont l’extraction est extrêmement polluante et générant un tsunami de déchets électriques et électromagnétiques. Pire, dans leur « numérico-mania », les dirigeants politiques trompent les citoyens, notamment en ce qui concerne la 5G, le catalyseur de la révolution numérique en cours.
Décryptons.

Les effets réels du virtuel

Le Pacte vert pour l’Europe et la communication de la Commission Façonner l’avenir numérique de l’Europe fixent l’ambition : être le chef de file mondial dans le domaine du numérique. À cet effet, « L’Europe doit accélérer les investissements dans la recherche et le déploiement de technologies dans des domaines tels que l’intelligence artificielle, la 5G et l’analyse de données et de métadonnées. » Ce qui rime(rait) avec écologie, car l’économie numérique est vue comme le levier de la « durabilité compétitive » de l’UE dans son ensemble.

Vendre le concept de l’économie numérique comme garant de la transition écologique est un marché de dupes. En premier lieu, c’est faire l’impasse sur l’impact environnemental de la massification de l’électricité, qui s’échelonne de l’extraction de métaux rares au fabricant de matériels spécialisés. Sans compter qu’une consommation quotidienne effrénée, voire compulsive, de ses multiples applications encourage une gabegie électrique sans précédent. À ce stade, le numérique est responsable de 4% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, soit le double du transport aérien ; une empreinte carbone amenée à doubler d’ici 2025.

L’effet rebond

Quant au principe selon lequel des progrès en matière d’écoconception, d’efficacité énergétique pourraient limiter le coût d’électricité et de l’uti1isation des minerais en amont, il élude la question fondamentale de l’effet rebond, dont l’automobile constitue un exemple frappant. Les
récents progrès techniques ont permis de produire des moteurs de voiture plus efficaces et moins polluants. Pourtant, la pollution automobile ne cesse de croître, car les gains énergétiques ont largement été compensés par un usage accru de la voiture.
[…]
La foi aveugle dans le numérique conduit à une cécité politique lourde de conséquence. La naïveté de croire que les avancées technologiques nous permettront de poursuivre notre fuite en avant. Une attitude schizophrénique où l’UE adopte à la fois un discours musclé sur l’indispensable réduction des émissions de gaz à effet de serre pour atteindre la neutralité climatique en 2050 – la clé de voûte du Pacte vert européen – tout en évacuant des débats le coût de la transition numérique.
[…]

Économie circulaire

Côté pile : l’enjeu de l’économie circulaire est clairement identifié. Entre 1970 et 2017, l’extraction annuelle mondiale de matériaux dans le monde a triplé et continue de croître. Près de la moitié de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre et plus de 90 % de la perte de biodiversité sont dus à l’extraction des ressources et à la transformation des matériaux, des combustibles et des denrées alimentaires. Par ailleurs. seulement 12% des matériaux utilisés par l’industrie européenne proviennent du recyclage. Ainsi, l’objectif de l’économie circulaire, dont l’enjeu est in fine de promouvoir l’utilisation efficace des ressources, tout en réduisant la production des déchets, représente incontestablement un volet essentiel de la transition écologique.

Extraits d’un article de Inès Trépant dans L’Écologiste de décembre 2020 – février 2021.

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