Contrats à impact social

En France, les contrats à impact social, qui transforment les associations en produits d’investissement financier, continuent de se développer à la faveur d’un lobbying puissant et malgré une concrétisation très laborieuse.
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Ce modèle bénéficie depuis son lancement en Angleterre en 2010 d’un lobbying puissant. Il permet au marché financier, toujours à la recherche de nouveaux débouchés, de rentabiliser les actions associatives. Dans la pratique, les contrats ont beaucoup de mal à s’incarner. Faire coincider logique financière et réalité humaine et sociale s’avère particulièrement ardu.
« La France est désormais le troisième pays au monde qui utilise le plus ces contrats », se réjouissait le 9 février 2022, Frédéric Tiberghien, président de Fair, le think tank qui les promeut en France. 21 millions d’euros sont investis dans les onze CIS signés; quatorze autres contrats sont en cours de structuration pour 45 millions d’euros. Au total, une trentaine de CIS sont en cours de création ou de réalisation depuis 2016, date du premier appel à projet en France. Seuls trois sont aujourd’hui arrivés à terme dont celui de la Cravate solidaire. Cette association proposait à des jeunes sans emploi de Seine-Saint-Denis et du Val-d’Oise un atelier pour leur transmettre les codes vestimentaires nécessaires à un entretien d’embauche.

L’investissement s’élevait à 450 000 euros – une petite somme pour les CIS qui descendent rarement au-dessous des 2 millions d’euros – avec un taux de retour évalué autour de 5%. Ces taux ne sont jamais détaillés ; les contrats des CIS restent protégés par le secret des affaires. Un récent rapport révélait que ce taux se situait autour de 4,5 % en France mais préconisait de l’augmenter jusqu’à 10 % pour attirer plus d’investisseurs et donnait pour modèle des pays où il peut atteindre 20 %.

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Dès 2016, le Haut conseil à la vie associative s’interrogeait : « Il n’est pas évident que ces montages complexes […] se révèlent profitables au final pour la collectivité. » L’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) mettait en garde sur l’opportunité que représentent ces contrats pour « former une culture de contrôle et d’évaluation en matière de prestations de services sociaux ».
Enfin, Bertrand Bréqueville, cadre dans l’humanitaire, y voit « la quintessence du néolibéralisme », une manière de « rentabiliser la misère et l’exclusion générées par le système capitaliste »

Extraits d’un article paru dans Transrural initiative de janvier 2023.

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